Naufrage d’un Navire-Négrier

LE 15 décembre dernier, un navire brésilien venant de la côte d’Afrique, avec une cargaison de 475 noirs, se trouvait travers le port de Santos (1), poussé par une violente tempête. Le capitaine ne voulant pas faire son débarquement en cet endroit, cherchait à s’éloigner de la côte pour s’en rapprocher pendant la nuit, afin de mettre ses esclaves à terre, dans un hâvre situé à une petite distance de cette ville, lieu désigné.

(1) Santos, ville du Brésil, port très-commerçant, à cinquante lieues sud-ouest de Rio-Janeiro. province de Panama.

Il fuyait sous le tems presqu’à sec de voiles, lorsqu’au déclin du jour, le vent changea tout-à-coup et le portait droit en côte, malgré tous les efforts de l’équipage, qui, ne pouvant plus manoeuvrer au milieu d’une mer affreuse, était menacé à chaque instant d’être enlevé par les lames.

Vers huit heures du soir, la pluie tombait par torrens, la nuit était obscure, et tout présageait aux malheureux matelots les approches d’une fin déplorable. Dans ce moment critique le gouvernail fut démonté, et le navire devint alors la proie des vagues et des vents.

Le capitaine voyant qu’il n’y avait plus d’espoir d’éviter la côte, fit ouvrir les écoutilles, et déchaîner les malheureux noirs qui étaient enfermés dans la cale, afin qu’ils pussent se sauver lorsque le navire serait à la côte.

Parmi tant d’homme tremblant aux approches d’une mort presqu’inévitable, ces infortunés étaient seuls insensibles au sort qui les menaçait: couchés tranquillement les uns près des autres, la plupart d’entr’eux reposaient en silence.

Vers minuit, le navire toucha sur des rochers, à une petite distance de la côte, près de Santos. Au bruit horrible que fit le navire en abordant sur ces récifs, tous les noirs montèrent en foule sur le pont, effrayés de cette terrible secousse.

Le capitaine ordonna alors de couper la mâture, mais l’équipage n’eut pas le tems d’exécuter ses ordres, un instant après le navire s’ouvrit, et tout le monde fut précipité dans la mer!

Que l’on se représente près de 500 personnes luttant contre la mort, au milieu des flots, dans l’obscurité la plus profonde, et l’on se fera une idée de cette scène de désolation.

Soixante esclaves sont parvenus à gagner la rive à la nage. Le capitaine, tout l’équipage et le reste des malheureux noirs ont péri dans cette épouvantable catastrophe.

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